NEWSLETTER

Les chansons de Ludovic - Stupeflip

(Re)découvrez l'originalité de la chanson française et francophone !
Ludovic Gourvennec

Je suis professeur de français et j'ai effectué l'essentiel de ma carrière à l'étranger. Je suis actuellement en poste dans le réseau des Écoles européennes. J'ai soutenu une thèse de doctorat consacrée à la chanson.

Pour vous aider à exploiter mes chansons en classe, n'hésitez pas à feuilleter mon article tiré de la revue de l'Association belge des professeurs de français "Vivre le français" : "Classe de FLE : 20 activités pour exploiter une chanson"

Ludovic Gourvennec

Derrière le nom improbable de Stupeflip se cachent 3 individus (que je trouve) fort recommandables, car hors système, qui se sont donné comme mission de mettre leur œuvre à distance de la société pour mieux la lire, la critiquer, en créant une organisation non moins improbable, le « CROU » (crew), qui vise à « terroriser la population et, par là même, instaurer une nouvelle ère : l’ère du Stup ». Vaste programme, à la fois idéologique (une forme de nihilisme) et esthétique (une forme d’hybridation générique), totalement désintéressé par la célébrité et le profit.

Il s’agit en réalité d’un mix improbable mais génial entre le rap, l’esthétique punk, le rock, l’électro et la pop, entre le chant et le parlé, la scansion et la diction, autant d’addictions qu’on accepte sans scrupules. Chaque chanteur adopte un rôle, une fonction, parfois même une façon d’articuler, et le discours véhiculé manifeste une sorte d’urgence à agir, à la fois au niveau individuel (la psychologie est importante) et collectif, les préoccupations sociales et sociétales étant au cœur de leur œuvre engagée. Dénonciation des injustices, des comportements inappropriés, incarnées par le masque/cagoule inquiétant d’un des chanteurs. Et le groupe se définit comme un programme (ci-dessous les paroles de la chanson « Hater’s Killah » de 2011 – que je vous conseille) :
« Stupeflip, c'est pas n'importe quoi
Ça fout l'feu, fait fondre, ça t'handicape quand tu l'as pas
C'est une construction mathématique (Hater's Killah)
Un truc métaphysique qui t'pique comme un aspic »

Positivement politique, mature et responsable mais à l’esprit adolescent, il se définit comme « le groupe bienveillant », car « t’écoutes le groupe culte qui refuse le monde adulte » (« Understup »). La diction dans les morceaux exprime d’ailleurs souvent une sorte de rage, qui refuse les évidences intolérables de notre société. Quelques exemples (au fil des années).

« Stupeflip » (2003) : la chanson définition pour bien comprendre l’enjeu de l’existence du groupe. « Stupeflip, ça t’agrippe ça t’attrape et ça fait pas d’sentiment ».

« La seule alternative » (2017) : le manifeste qui propulse leur œuvre en avant !

« The Antidot » (2018) : le groupe désormais comme une alternative médicale aux virus sociétaux, comme un espace hospitalier qui accueille les victimes du système (« Si tu te sens à bout / Si tu as pris des coups / Faut qu't'écoutes le Stupeflip crou / Et si la vie te saoule / Et si tu te sens seul.e / Faut qu't'écoutes le Stupeflip crou ».

« Vengeance » (2020) : toujours message radical (« Moi c'est King Ju, c'est le fléau / C'ui qui criait pas dans le préau / J'en ai rien à fout' de la météo / Devant mon ordi, j'attends le chaos. »)

« Tellement bon » (2022) : loin des hypocrisies aveugles liées à la consommation très répandue du cannabis dans la société, une chanson qui assume un positionnement politique lié à la dépénalisation. La chanson entre en écho avec une autre de 2010 (« Je fume pu d’shit »).