Derrière le nom improbable de Stupeflip se cachent 3 individus (que je trouve) fort recommandables, car hors système, qui se sont donné comme mission de mettre leur œuvre à distance de la société pour mieux la lire, la critiquer, en créant une organisation non moins improbable, le « CROU » (crew), qui vise à « terroriser la population et, par là même, instaurer une nouvelle ère : l’ère du Stup ». Vaste programme, à la fois idéologique (une forme de nihilisme) et esthétique (une forme d’hybridation générique), totalement désintéressé par la célébrité et le profit.
Il s’agit en réalité d’un mix improbable mais génial entre le rap, l’esthétique punk, le rock, l’électro et la pop, entre le chant et le parlé, la scansion et la diction, autant d’addictions qu’on accepte sans scrupules. Chaque chanteur adopte un rôle, une fonction, parfois même une façon d’articuler, et le discours véhiculé manifeste une sorte d’urgence à agir, à la fois au niveau individuel (la psychologie est importante) et collectif, les préoccupations sociales et sociétales étant au cœur de leur œuvre engagée. Dénonciation des injustices, des comportements inappropriés, incarnées par le masque/cagoule inquiétant d’un des chanteurs. Et le groupe se définit comme un programme (ci-dessous les paroles de la chanson « Hater’s Killah » de 2011 – que je vous conseille) :
« Stupeflip, c'est pas n'importe quoi
Ça fout l'feu, fait fondre, ça t'handicape quand tu l'as pas
C'est une construction mathématique (Hater's Killah)
Un truc métaphysique qui t'pique comme un aspic »
Positivement politique, mature et responsable mais à l’esprit adolescent, il se définit comme « le groupe bienveillant », car « t’écoutes le groupe culte qui refuse le monde adulte » (« Understup »). La diction dans les morceaux exprime d’ailleurs souvent une sorte de rage, qui refuse les évidences intolérables de notre société. Quelques exemples (au fil des années).
« Stupeflip » (2003) : la chanson définition pour bien comprendre l’enjeu de l’existence du groupe. « Stupeflip, ça t’agrippe ça t’attrape et ça fait pas d’sentiment ».