Francis Cabrel constitue une sorte de double marque déposée, à l’échelle nationale et à l’échelle locale. D’une part artistiquement, évidemment, dans la chanson française, car il l’a marquée depuis bien longtemps déjà (la fin des années 70) avec ses si nombreux tubes. Mais d’autre part, d’une certaine manière idéologiquement, éthiquement ou localement, car, originaire d’Agen, il s’est engagé au point de devenir maire de sa petite commune du sud de la France, et car il a créé, dans sa terre natale, une structure musicale visant à promouvoir les nouveaux talents. Il est finalement assez rare de voir des artistes aussi unanimement reconnus et qui, presque parallèlement, fuient la célébrité, qui pensent autant à eux qu’aux autres (il est sympa, en plus, il fait plein de tutos sur YouTube).
Car Francis Cabrel est une pointure de la chanson qui a créé des tubes qui resteront dans la culture française mais qui, et ce n’est pas si fréquent, tente de se renouveler. Voici un panorama de son œuvre abondante, dans laquelle je sélectionne subjectivement les chansons que je préfère, et qui m’ont accompagné dans mon existence depuis mes 15 ans.
« Les murs de poussière » (1977) : chanson des soirées entre potes, où, quand on est tout jeune, on se dit qu’il faudra partir et aller découvrir le monde. Or, ce texte, qui est d’un abord positif et intéressant, qui fait la part belle sur deux couplets aux vertus de l’ouverture, de la capacité à s’extraire d’un milieu et à aller découvrir d’autres contrées qui enrichiront culturellement les individus, se conclut finalement sur le fait que l’idéal reste indéfectiblement sa terre d’origine (même si on a parcouru la diversité du monde, c’est bien de revenir car il n’y a pas mieux ailleurs que chez soi, « Heureux qui comme Ulysse » disait Du Bellay, repris naguère par Brassens et plus récemment par Ridan).